COMMODE D'EPOQUE REGENCE PAR CHARLES CRESSENT, VERS 1725-1735 En placage de satiné et amarante, ornementation de bronze ciselé et doré, le dessus de marbre brun rouge, la fa?ade ouvrant par deux tiroirs, les montants galbés à c?tes pincées ornés de masques féminins, terminés par des pieds agrémentés de griffes, portant au dos à droite un numéro d'inventaire à la peinture blanche '2965 'et une inscription à l'encre noir à l'intérieur de la fa?ade du tiroir supérieure AHF et deux étiquettes imprimées allemandes, l'une sur le plateau sous le marbre, l'autre à l'intérieur du premier tiroir H.: 82 cm. (32 ? in.) ; L.: 130 cm. (51 in.) ; P.: 57,5 cm. (22 ? in.) Charles Cressent, re?u ma?tre en 1714
Charles Cressent (1685-1767) était sculpteur de formation et issu d'une famille de sculpteurs sur bois d'Amiens. A ses débuts, il travailla dans l'atelier familial d'Amiens avant de venir à Paris où il semble avoir été occupé à ciseler des bronzes d'art pour les sculpteurs Girardon et Le Lorrain.
Sa facilité à créer des modèles de bronze doré le mit en contact avec des ateliers parisiens d'ébénisterie, notamment celui de Joseph Poitou. Les hasards de la vie firent qu'au décès de ce dernier en 1719, il épousa sa veuve et se trouva à la tête d'un petit atelier d'ébénisterie qu'il fit rapidement prospérer, s'attirant la clientèle du Régent (et par la suite celle des ducs d'Orléans) ce qui lui valut un brevet d'ébéniste du Régent qui lui permettait d'exercer son métier -à défaut d'une ma?trise d'ébéniste-.
Son talent devait lui valoir aussi la clientèle des grands financiers et collectionneurs parisiens (Crozat, Blondel de Gagny, Marin de la Haye, Verdeilhan Desfourniels, Saintard, Harence de Presle, Darras, les fils de Samuel Bernard ...) et des hauts fonctionnaires ou ministres (Jean de Boullongne, Rouillé de Jouy, Machault ...).
Sa formation de sculpteur explique le r?le prépondérant, dans ses meubles, du décor de bronze doré qui, à la suite de Boulle, va marquer durablement l'histoire du mobilier fran?ais. La présence récurrente de la figure humaine (bustes et têtes de femme, masques mythologiques, enfants), ainsi que des animaux (singes, chiens, lions et dragons), l'utilisation des trophées, guirlandes de fleurs et palmes réminiscentes de l'art des boiseries parisiennes du temps, ainsi que l'échelle de ces éléments, devaient laisser une image distinctive de son oeuvre.
Cette commode appartient à une série de commodes à la Régence à tiroirs entourés de larges cadres de bronze doré, série produite par Cressent dans les années 1725-1735. Divers meubles de ce types furent décrits dans la première vente du stock de Cressent en 1749, mais ne figurent plus dans les ventes suivantes, en 1757 et 1765, ce qui montre bien que leur production en était arrêtée dès les années 1740.
Le prototype en est la commode du musée de Meaux, attribuée depuis longtemps à Cressent et qui correspond sans doute à celle décrite dans la vente de 1749 sous le numéro 17. Notre commode présente le même placage de bois satiné que nombre de commodes de cette série (voir A. Pradère, Charles Cressent, sculpteur, ébéniste du Régent, Dijon, 2003, cat. numéros 87, 89, 90 et 94) et des bronzes appartenant au répertoire habituel de Cressent, que l'on voit sur divers bureaux ou commodes ; les poignées, cadres, sabots et entrée de serrure supérieure se retrouvent notamment sur la commode du musée de Meaux, tandis que l'ornement du tablier et l'entrée inférieure en forme de cartouche avec des dragons se retrouvent sur diverses commodes (cat. numéros 86, 88, 89 et 90). Ici, les seuls bronzes inhabituels sont les masques féminins aux angles, motifs de belle qualité qui signalent une oeuvre au-dessus de la production courante de Cressent.
Si l'on tente de trouver des correspondances dans la vente de 1749, on trouve sous le numéro 27 une commode de même description -à l'exception du marbre- et de mêmes dimensions, où l'on signale d'ailleurs "de beaux masques" :
"No 27. Une commode de bois violet à deux tiroirs, faite à la Régence, garnie de tous ses ornements, à cadres sur les tiroirs, des chutes avec des beaux masques, le tout très riche en bronze, mis en couleur d'or, le marbre de Sainte-Beaume, de 4 pieds 2 pouces 6 lignes [137 cm], vendue 300 [ou 900 ?] livres".
Nous remercions M. Alexandre Pradère de son aide pour la rédaction de la présente notice.