Important reliquaire renfermant des cheveux de Louis XVI, provenant de Fran?ois Hüe, premier valet de chambre du roi.Précieux reliquaire en forme de c?ur, en or, gravé sur le devant des armes de France couronnées ceintes de deux palmes nouées à la base, surmonté d’une bélière et d’un anneau de suspension, un petit taquet situé à sa pointe permet de l’ouvrir verticalement. L’intérieur présente deux textes délicatement gravés, l’un sur le couvercle, l’autre sur le fond. Ce dernier encadre une fine capsule de verre renfermant une mèche de cheveux chatains à reflets roux, dont la base est entourée par deux petites palmes gravées. Ce reliquaire est conservé dans un écrin en forme de c?ur en galuchat vert, l’intérieur doublé de velours de soie violette. Transcription exacte des textes gravés dans le couvercle et le fond du c?ur :
Extrait du testament
De Louis Seize du 25
Decembre 1792
Je Croirois Calomnier Cependant
Les Sentimens de la Nation, Si
Je ne Recommandois Ouvertement
A Mon Fils, Messieurs de Chamilly
Et hüe, que leur Veritable
Attachement pour Moi avoit
Portés a s’enfermer avec
Moi dans Ce triste
Séjour, et qui Ont
Pensé En être les
Malheureuse
Victimes.
Cheveux de Louis Seize
Roi de France donnés par Sa
Majesté à Francois hüe
Enfermé avec Le Roi Et Sa
Famille dans La tour du
Temple à paris Jusqu’au 2
7bre 1792 qu’il y a été arrêté
Pour être Dela Conduit
En Prison D’ou il
A été élargi
Le 17 Du
Meme Mois
Le reliquaire : 52 x 44 mm, poids brut : 28,4 gL’écrin : 61 x 55 mm Fran?ois Hüe est né à Fontainebleau le 18 novembre 1757. Huissier de la chambre du Roi par brevet du 21 janvier 1787, il est ensuite nommé premier valet de chambre du Dauphin. Le 10 ao?t 1792, il échappe au massacre des Tuileries en fuyant le palais par une fenêtre puis en se jetant dans la Seine. Le lendemain il réussit à rejoindre la famille royale réfugiée dans l’ancien couvent de Feuillants. à la demande de Louis XVI, il demeure au service de la famille royale enfermée au Temple jusqu’à sa propre arrestation le 2 septembre 1792. Relaché, puis arrêté de nouveau il reste, malgré le danger, fidèle au Roi et à sa famille emprisonnée. Il échappe toutefois au sort funeste réservé aux proches du Roi. Cette fidélité sans failles lui vaut de figurer sur le testament rédigé par Louis XVI le 25 décembre 1792, au c?té des seuls Chamilly et Clery ainsi que des trois avocats Malesherbes, Tronchet et de Sèze. Après l’exécution du Roi le 21 janvier 1793 et de la Reine le 16 octobre, il tente vainement de reprendre son service auprès de l’orphelin du Temple. Devenu Louis XVII, ce dernier meurt au Temple, le 8 juin 1795. En décembre 1795, Madame Royale, fille de Louis XVI et unique survivante de la famille est libérée par le Directoire et échangée contre des prisonniers fran?ais aux mains des Autrichiens. La jeune princesse orpheline le choisit pour l’accompagner à Vienne. Par la suite, il demeure auprès du comte de Provence, devenu Louis XVIII, qui en fait en 1796 le commissaire général de sa maison. à la Restauration, celui-ci le nomme premier valet de chambre du Roi, trésorier général de sa maison et, pour récompenser sa fidélité, le crée baron. Lors de Cent-Jours, il est chargé d’escorter les diamants de la Couronne hors de France. Il meurt à Paris le 19 janvier 1819 en disant ? Tous mes v?ux sont accomplis. J’ai vu mon Roi rétabli sur le tr?ne de ses pères, et ma cendre ne reposera pas en terre étrangère ?. Hasard du destin, son service funèbre se déroule à Saint-Germain l’Auxerrois, le 21 janvier 1819, après la messe expiatoire célébrée pour son ma?tre Louis XVI. Ainsi, comme l’écrit Chateaubriand ? L’oraison funèbre de M. Hüe est prononcée aujourd’hui dans toutes les églises de France : c’est Louis XVI lui-même qui l’a faite, en écrivant dans son testament le nom de son fidèle serviteur. ? (Chateaubriand, ? ?uvres complètes, tome vingt-huitième, Mélanges politiques, Tome III, Polémique ?, Pourrat frères, Paris 1838, tome 28, p. 247) Comme Jean-Baptiste Cléry, dernier valet de Louis XVI au Temple, qui publia en 1798 à Londres son ? Journal de ce qui s'est passé à la tour du Temple pendant la captivité de Louis XVI ?, Fran?ois Hüe a laissé un précieux témoignage intitulé ? Dernières années du règne et de la vie de Louis XVI ?, paru à Londres en 1806 et réédité à Paris en 1814 et 1860 (cette dernière édition précédée d’une notice biographique). Dans cet ouvrage, page 363 de l’édition de 1860, il indique comment le roi lui offrit ses cheveux : ? Une autre fois, comme j'attachais au chevet de son lit une épingle noire, dont j'avais fait une espèce de porte-montre, le Roi me glissa dans la main un papier roulé. ? Voilà de mes cheveux, me dit-il ; c'est le seul présent que je puisse vous faire dans ce moment. ? Ombre à jamais chérie ! je le conserverai soigneusement, ce don précieux ! Héritage de mon fils, il passera à mes descendants ; et tous verront dans ce témoignage particulier des bontés de Louis XVI qu'ils eurent un père qui, par sa fidélité, mérita l'affection de son Roi ! ? Après la mort du Roi, ses cheveux, devenus reliques quasi sacrées, eurent toujours pour Fran?ois Hüe un prix considérable. Il en donna cependant à Malesherbes, dont il était proche, qui le remercia en ces termes dans une lettre du 4 avril 1793 (p. 452 de l’édition de 1860). ? J’ai re?u, Monsieur, avec la plus vive reconnoissance, le plus précieux de tous les présens. Il acquiert encore un nouveau prix pour moi, me venant de la main du plus fidèle serviteur de notre malheureux Ma?tre. ? Parti pour l’Autriche en 1795 accompagner Madame Royale, future duchesse d’Angoulême, il est plus que vraisemblable qu’il emporta ce précieux souvenir et que c’est au cours de ces presque vingt ans d’émigration au service du roi Louis XVIII en exil qu’il fit réaliser le reliquaire qui les préserve. Pour marquer l’importance historique de ce qu’il protège, Fran?ois Hüe choisit alors de placer les cheveux du roi Louis XVI au centre d’un c?ur d’or et de faire graver le passage du testament du Roi le citant, ainsi qu’une brève légende historique. Plusieurs indices confortent l’hypothèse d’un travail étranger de la fin du XVIIIe siècle. Tout d’abord l’absence de poin?on de contr?le visible, ensuite la finesse et le style de la gravure, enfin et surtout l’omission presque générale d’accents et la présence de nombreuses majuscules placées de fa?on confuse suggère une gravure effectuée dans un pays étranger, peut-être germanophone, l’Autriche ou la Courlande (Louis XVIII et sa famille résidèrent au palais de Mitau de 1797 à 1801, puis de 1804 à 1807). Conservé depuis dans la descendance de Fran?ois Hüe, cet émouvant reliquaire, symbole d’une des pages les plus sombres de l’histoire de France, est un rare et précieux souvenir historique.